793.2025. Le train

Dans l’Antiquité, j’étais stagiaire, élève-ingénieur, dans le bureau d’études  de la SNCF à La Bocca en compagnie de mon ami Lucien. 
On y étudiait le ré usinage des roues de train. En effet, ces malheureuses sont bien maltraitées au cours de leur carrière 
et il est nécessaire de les remettre en état régulièrement. L’énergie cinétique d’un train c’est 200 fois celle d’un 10 tonnes. Pas facile à maitriser. 
De plus, le frottement des roues d’acier sur un rail d’acier n’y aide en rien. Un freinage trop accentué cause inévitablement un patinage, la roue bloquée glisse sur le rail et un beau méplat se forme. 
De même, au démarrage, vouloir mettre trop de puissance génère le même problème. Il faut beaucoup de doigté et de légèreté au mécanicien. 
S’y ajoutent les heurts à chaque intervalle entre rails successifs. Bref, il convient de ré usiner de temps en temps ces malheureuses du moins tant qu’il leur reste assez de matière.   
A vrai dire, avec Lucien nous prenions plus de temps à parcourir la riche bibliothèque du lieu, bien dotée en San Antonio, qu’à nous interroger sur la mécanique des frottements ou à nous demander pourquoi ces roues présentent une étrange double conicité terminée par une joue latérale. 
Et pourtant, quelle belle preuve de l’intelligence humaine. En effet, les deux roues d’un essieu de train sont solidaires : elles tournent forcément à la même vitesse. 
Or, lors d’une courbe, la roue extérieure doit décrire une courbe plus étendue que celle de la roue interne. On connait ça pour les roues arrière des voitures. Pour éviter frottement de l’une ou patinage de l’autre, on a inventé le différentiel. Ce dispositif rattrape la différence entre les deux trajets. Ce n’est pas le cas du train. Ici, pas besoin d’un mécanisme compliqué, tout est résolu par la conicité des roues. Tout naturellement, la roue externe va glisser latéralement et adopter un plus grand diamètre pendant que, simultanément, la roue interne se décale d’autant vers un diamètre plus petit. Ainsi le tour est joué : à vitesse de rotation égale, la roue externe parcourt un chemin plus long et le train s’adapte au virage de la voie. En ligne droite, les deux roues se régulent automatiquement sur un rayon identique.
Chapeau!

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