1948. J’ai
10 ans. Nice, la grande foire de Noël. Une baraque de dresseur de puces !
50 francs, l’entrée. On y va en famille !
La pièce est
petite. Au centre, une surface plate, circulaire, blanche, violemment éclairée
par des scialytiques. Nous sommes tous agglutinés autour. Et le spectacle
commence.
C’est
d’abord un bref topo pour nous expliquer qu’il ne faut pas confondre les puces
d’hommes avec celles de chiens ou de chats. Seules les nôtres peuvent être
éduquées. Le dompteur déclare d’ailleurs qu’il est prêt à en acheter au prix de
50 francs l’une (le prix d’entrée) aux chanceux qui en portent sur eux-mêmes.
Puis, il
sort une boîte d’allumettes suédoises, en bois, peinte en rouge. Il en sort
quatre minuscules carrosses en papier alu, les pose sur l’arène. Les carrosses
avancent. Le dresseur nous montre, sous ces fragiles véhicules, les puces qui les
trainent. D’autres boîtes apportent des couples de danseurs que des
puces font valser. Les puces sont fixées à demeure sous leur carapace d’alu. Le
dompteur montre son avant-bras, velu, dont il a rasé une surface pour y nourrir
le soir ses protégées.
Les numéros
se suivent. Une puce porte une charge énorme, une autre saute. Proportionnellement,
nous serions capables de franchir la Tour Eiffel. Une puce est posée sur le
dos. Le dompteur dépose délicatement une minuscule bille sur ses pattes qui
s’agitent. A son ordre : « Jette », la puce envoie la bille en
l’air. L’exercice est répété. Chaque fois avec succès. A tout autre ordre, rien
ne se passe.
S’agissait-il
d’une mystification ? S’agissait-il réellement d’un dressage ? Bien
sûr, Wikipédia explique tout ça. Mais, est-il judicieux de
vouloir rationaliser le rêve ?