730.2025.Nocturne en do majeur.

J’avais pensé « Prélude en do majeur ».
Mais, il y a Bach, le BWV 846 du Clavecin bien tempéré. Des notes si légères qui s’enchainent harmonieusement, des tonalités qui évoluent toutes en gradations, une musique limpide, calme, sereine. 3minutes de bonheur.
Alors, « Trio en do majeur ? ». Mais il y a Schubert et son opus 100. Une œuvre à la fois lancinante, calme, reposante, toute en douceur où les trois instruments s’épaulent tendrement. Un morceau que j’adore. Dès les premières notes, j’y suis embarqué.
Peut-être « Étude en do majeur ? » Et Chopin, avec son opus 10. Des cascades de montées chromatiques de la main droite ponctuées par une cadence de la main gauche. Ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle « La Cascade ». Une étude à coup sûr mais en rien scolaire. Une pépite comme toutes les pépites que sont ses études.
Pourquoi pas « Sonate » alors? Mais voilà Mozart, toujours gamin, et sa  Sonate 16 KV 545. Une œuvre qui semble si enfantine, si gracieuse, si aérienne qu’on la dit « facile » et qui l’est si peu. Une petite sonate pour débutants disait-il. Mais, c’est quoi un débutant pour Monsieur Mozart ?
On arrive au « Concerto » et apparait Beethoven, pas encore sourd, qui présente son Concerto op 15, l’un des piliers de la musique classique. Une musique que nous aimions tant dans nos jeunes années. Un régal pour ceux qui ont encore leurs deux oreilles.
Vraiment pas le « Concerto », car voilà aussi Vivaldi,RV 554  un autre stakhanoviste de la musique, jamais en peine de brosser un concerto en deux temps, trois mouvements. L'un des 500 qu’on lui attribue. Dès qu’on ouvre le « tourne-disque », c’est du Vivaldi. Salut prêtre roux !
Alors, peut-être une « Symphonie en do majeur ». C’est pas mal aussi ! Mais Haydn n’a pas de peine pour sortir de son catalogue bien fourni la 38 ième dite « Echo » en raison des échanges entre les rangs des violons. Du beau travail, comme d’habitude. Bien que, à vrai dire, il ait pu mieux faire !
Et si j’osais « Boléro en do majeur ? » Pas de pot, Ravel y a pensé. Vous connaissez peut-être ?
Bref, ce sera « Nocturne en do majeur ».

729.2025. Un avenir radieux

 
Qu’elle est belle la petite Suzette ! 
Elle porte fièrement sa jolie robe écossaise  avec un coquet nœud assorti dans ses cheveux soigneusement peignés. 
Sa Maman lui a confié une mission importante : 
aller chercher le lait avec son petit frère. 
Quelle responsabilité !
Tous deux tiennent leur pot à lait. 
Ils montent l’escalier au bout de la rue Gazagnaire puis la rue Louis Pastour. Un long périple. 
Les voilà à Stan et bientôt à la ferme. 
Le retour sera plus difficile avec les bidons pleins.
C’était hier. 
Comment ? Exploiter les enfants ? 
Les laisser aller seuls dans les rues désertes ?
 Leur confier le portemonnaie ? 
Acheter du lait non bio, non pasteurisé, non stérilisé, non upérisé, non emballé, non écrémé, non allégé ?   
Mettre en danger leur santé en consommant un liquide 
qui va se couvrir d’une épaisse couche suspecte de crème, 
faire une peau malsaine et élastique à la cuisson, 
un breuvage qui va tourner si on ne prend pas la précaution de le faire longuement  bouillir ?
Tous ces problèmes seront bientôt réglés : 
plus de travail des enfants, une éducation scolaire au top, 
la sécurité dans nos quartiers, des règles sanitaires strictes, 
une population apaisée.
Un avenir radieux les attend.

728.2025.Complicité.

Ce n’est pas mon vrai Papa. 
Mais je tiens tellement à lui.
Manon est au lit. Laurent lit. 
Curieux comme ce nom et ce verbe, 
identiques,
s’associent pour ce moment délicieux du soir. 
Tendrement appuyée sur l’épaule de Laurent, 
elle écoute attentivement une des aventures de Tintin. 
On voit bien que, tous deux, sont ravis au lit.
Nos enfants, nos petits enfants 
ont été nourris à cette tradition 
de la lecture parentale avant le sommeil du soir. 
Ils s’endormaient et s’endorment 
toujours poursuivant les gangsters de Chicago, 
sauvant l’ami Tchang au Tibet, 
perdus à la recherche de l’or noir du désert 
ou ébahis sur une étoile mystérieuse, 
bercés par les titres magiques du Crabe aux pinces d’or, 
des Cigares du Pharaon ou du Lotus bleu 
avant de parti carrément explorer le Lune. 
Merci Monsieur Hergé.  

727.2025.Le Ventelet

Il y a ceux qu’on connait bien dans le Sud : le Mistral et son amie la Tramontane.
Il y a ceux qui rafraichissent : la douce Brise ou le Libeccio,
Il y a aussi les plus actifs comme la Lombarde, l’Etésien ou le Zef
Il y a ceux qui chauffent : c’est le cas du Foehn et du Sirocco
Il y a ceux qui ne renient pas leur origine : le vent d’Autan, le Suroît ou le Ponant
Il y a ceux qui font rêver aux pays lointains : la Mousson ou l’Aquilon
Il y a ceux qui sont aimés des poètes : le Zéphir ou les Alysés
Il y a enfin ceux qui font peur : la Trombe, la Tornade, le Typhon, l’Hurricane et le Cyclone.
 
 Et puis, il y a le petit dernier, le petit vent léger et doux, le Ventelet. 
Merci Bribri !
 
« Il faisait un joli soleil couleur d’eau de Cologne. 
Un ventelet soufflait du rivage et soulevait
 la surface miroitante en mille petits plis »   
Léonce Bourliaguet, Les aventures du petit rat Justin 

726.2025.Coucher de soleil sur tête noire

Une jolie femme nous tourne le dos. 
Elle est belle. 
Je m’escrime en général à en représenter au mieux les délicats traits du visage, 
la ligne des épaules ou la finesse de la taille. 
Par approximations successives, le dessin émerge, finit par convenir. 
A l’étape qui suit, je mêle les peintures. 
Sur une base du jaune auréoline, j’ajoute un brin d’orange transparent et un zeste de brun de Mars. 
Ca y est, j’ai le teint de la peau dorée en sa partie éclairée par le soleil estival.
 J’ajoute un peu de bleu outremer français pour faire apparaître des ombres chaleureuses.
La femme est blonde avec des mèches transparentes mais le chignon, en masse, fait apparaître la chevelure comme une masse assombrie. 
Difficile de nuancer avec la couleur de la peau. Reste le fond : sombre sur le côté droit, éclairci de l’autre.  Tout ça fait bien banal.
Alors je m’évade. Elle sera brune et son visage ne sera qu’évoqué par un fond coloré mystérieux. 
Ensuite, je quitte le tracé, le raidit par quelques coups de pinceau anguleux. 
Le vêtement ne se laissera que deviner. 
Et tout d’un coup, le superbe orange transparent se manifeste, éclate dans le fond. 
C’est lui qui sera la vedette. 
On ne s’attarde plus sur cette personne mais on s’interroge sur ce coucher de soleil éparpillé dans la noire chevelure.  
Sans hésiter, j’appelle l’encre de Chine, moi qui ai banni le noir de ma boite de couleurs. 
Son noir agressif tranche avec les douces nuances des personnages aquarellés. 
Paradoxalement, la douceur féminine ressort bien d’avantage grâce à ces traits de serpe d’un noir violent.